Concert du 14 mai 1963, Paris Théâtre des Champs-Elysées

Orchestre National de la Radio Télévision Française
Direction : Carl Schuricht, soliste : Arthur Grumiaux
Programme 
Schumann, ouverture de Manfred
Mendelssohn : concerto pour violon et orchestre
Beethoven : symphonie N‹3 , dite héroïque
Critique parue dans le journal Le Monde
Typed out by M. François Audigier

« Il existe un certain nombre de chefs spectaculaires et inefficaces ; quelques autres joignent lfutile à lfagréable. Rares sont ceux qui galvanisent un orchestre en se contentant de battre la mesure. Carl Schuricht appartient de toute évidence à cette catégorie (et Monteux, bien sûr).

On me dira que ces chefs sont des octogénaires bien incapables de gesticuler comme leurs cadets. Mais cette hypothèse irrespectueuse néglige lfessentiel : un chef comme Carl Schuricht parvient à lfâge de 83 ans, à passionner un orchestre pendant les répétitions, à renouveler lfintérêt des pages les plus ressassées et, avec son seul regard, à électriser les musiciens pendant le concert (Ajoutons que Carl Schuricht ne voyage jamais sans son matériel dforchestre complet et annoté des œuvres qufil doit conduire).

Cela explique sans doute la qualité exceptionnelle de la Symphonie héroïque que Schuricht vient de diriger à la tête de lfOrchestre national, une Symphonie héroïque extrêmement classique de conception, mais dont la logique et la rigueur de structure étaient admirables. Dans les deux premiers mouvements, Schuricht adopte des tempi plutôt rapides, mais il maintient constamment son tempo et ne se permet aucune de ces fantaisies rythmiques familières à dfautres chefs également célèbres. Enfin, il réussit une prodigieuse différenciation des plans sonores, un travail de timbres subtilement dosé et aboutissant à la clarté absolue de la pensée architecturale beethovénienne.

Ces mêmes qualités ont été mises au service de lfouverture de Manfred de Schumann qui débutait le concert, et ce concert eut été un événement remarquable si, entre Schumann et Beethoven, ne sfétait glissée une fâcheuse exécution du Concerto pour violon de Mendelssohn. Faut-il incriminer une incompatibilité de tempérament entre Carl Schuricht et Arthur Grumiaux, ou le peu dféclat et de fantaisie du violoniste ? Lfun et lfautre sans doute.

Mais un médiocre concerto de Mendelssohn ne saurait heureusement pas nous faire oublier une transcendante Symphonie héroïque. »

Claude Samuel


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